Nutrition et cancers : le point sur une relation controverséeL'Institut national du cancer a récemment fait
le point sur les liens entre l'alimentation et les cancers. Rôle de
l'alcool, de la viande, du sel... La brochure remise aux professionnels
a suscité bien des polémiques. Petit décryptage.
Depuis près de 40 ans, de nombreuses études ont cherché à préciser
le rôle de certains facteurs nutritionnels susceptibles de favoriser ou
au contraire de prévenir la survenue des cancers.
Facteurs augmentant le risque de cancerLa consommation de boissons alcoolisées est associée à une augmentation du risque de plusieurs cancers (
cancer de la bouche, cancer du pharynx et cancer du larynx,
cancer de l'oesophage,
cancer du côlon-rectum,
cancer du sein et
cancer du foie,
de 9 à 168 % par verre consommé par jour, selon les localisations1. La
brochure de l'Inca précise que "ce risque augmente avec la quantité
globale d'
alcoolabsorbée et est significatif dès une consommation moyenne d'un verre
par jour"1. Cependant, le verre de vin quotidien a des vertus
démontrées contre les maladies cardiovasculaires, ce qui justifiait
jusqu'à présent de pouvoir consommer un verre par jour si vous êtes une
femme et deux verres si vous êtes un homme, selon les recommandations
du rapport WCRF/AICR publié fin 20072. Cette brochure de l'Inca
instaure donc un doute, très contesté par les défenseurs du vin, sur
les bénéfices de la consommation modérée d'alcool. Un doute qui devra
être levé par des études spécifiques actuellement manquantes sur
l'impact cancéreux d'une telle consommation.
Les viandes rouges et charcuteries : Selon l'Inca
1, le risque de cancer colorectal augmente de 29 % par portion par 100 g de
viandesrouges consommées par jour et de 21 % par portion de 50 g de
charcuteries consommées par jour. Or l'Inca précise qu'"un quart de la
population en France consomme au moins 500 g de viandes rouges par
semaine et plus d'un quart de la population au moins 50 g de
charcuteries par jour". N'en déduisez cependant surtout pas qu'il ne
faut plus du tout consommer de viande rouge ! Le WCRF recommande ainsi
de limiter la consommation de viandes rouges à moins de 500 g par
semaine, soit moins de 70 g par jour. Pour compléter les apports en
protéines, vous pouvez alterner avec des viandes blanches, du
poisson, des
oeufset des légumineuses (pois cassés, haricots secs...). Il faut aussi
limiter la consommation de charcuteries, en particulier celles qui sont
très grasses et/ou très salées et, de façon générale, réduire la taille
des portions et la fréquence des consommations.
Sel et aliments salés : leur consommation augmente de manière
probable les risques de cancer de l'estomac1. En France, deux tiers des
hommes et un quart des femmes ont des apports en sel supérieurs à 8 g
par jour. En pratique, il faut limiter la
consommation de sel en réduisant la consommation d'aliments transformés salés (charcuteries,
fromages, soupes et bouillons, plats composés...) et l'ajout de sel pendant la cuisson, de façon à ne pas dépasser 6 g par jour.
Compléments alimentaires à base de bêta-carotène : chez les sujets exposés à des cancérogènes - tels que les fumeurs ou ceux exposés à
l'amiante -
la consommation au long cours de ces compléments à de fortes doses (20
à 30 mg par jour) augmente significativement le risque de
cancer du poumon1.
En outre, la supplémentation en bêta-carotène est associée à un risque
plus élevé de mortalité, toutes causes confondues1. Les apports
journaliers recommandés en bêta-carotène sont de 2,1 mg et doivent être
fournis par l'alimentation. On trouve le bêta-carotène dans les
carottes, le chou-vert, les épinards, les abricots... Il ne faut donc
pas consommer de compléments alimentaires à base de bêta-carotène.
D'ailleurs, sauf cas particuliers de déficiences et sous le contrôle
d'un médecin, la consommation de compléments alimentaires n'est pas
recommandée : les besoins nutritionnels sont couverts par une
alimentation équilibrée et diversifiée.
Ajoutons à cette liste le
surpoids et
l'obésité. L'accroissement de la corpulence est en effet associé à une augmentation du risque de plusieurs cancers : oesophage,
cancer de l'endomètre,
cancer du rein, côlon-rectum,
cancer du pancréas, cancer du sein (après la
ménopause) et vésicule biliaire
1.
Facteurs réduisant le risque de cancerLa consommation de fruits et légumesest
associée à une réduction du risque de plusieurs cancers : bouche,
pharynx, estomac et poumon (dans le cas des fruits seulement) 1. En
outre, les
fruits et surtout les
légumes contribuent à la réduction du risque de prise de poids, de
surpoids et d'
obésité.
Par ces effets, ils pourraient exercer un effet protecteur indirect
vis-à-vis d'autres cancers. Les recommandations ? Consommer chaque jour
au moins 5 fruits et légumes variés, frais, en conserve ou surgelés,
crus ou cuits, pour atteindre au minimum 400 g par jour. On entend par
légumes les légumes non féculents (pommes de terre...) et les légumes
fruits (tels que tomates et concombres). Il faut aussi consommer chaque
jour d'autres aliments contenant des fibres tels que les aliments
céréaliers peu transformés (pain complet, flocons d'avoine) et les
légumes secs.
L'allaitementest associé, chez la mère, à une diminution du risque de cancer du
sein, avant et après la ménopause. De plus, chez les enfants qui ont
été allaités, le risque de surpoids et d'obésité est diminué. Il est
donc recommandé aux femmes d'allaiter, si possible de façon exclusive,
leur enfant jusqu'à l'âge de 6 mois1.
En dehors de l'alimentation, l'
activité physiques'associe à une diminution des risques de cancer du côlon (-18 à 29 %),
de cancer du sein (après la ménopause) et de cancer de l'endomètre1. Il
est donc recommandé pour les adultes de pratiquer au moins 5 jours par
semaine 30 minutes minimum d'activité physique d'intensité modérée
(marche rapide...) ou de pratiquer 3 jours par semaine 20 minutes
d'activité physique d'intensité élevée (jogging...).