Elle serait l’exception qui confirme la règle: une araignée sud-américaine a un régime alimentaire presque uniquement végétarien. Son péché mignon: l’acacia, qu’elle vole aux fourmis !
L'araignée herbivore défendant son nid face à une fourmi vivant dans un acacia. (R. L. Curry)Manger des fruits et des légumes est un message nutritionnel qui n’est pas arrivé jusqu’aux 40.000 araignées connues, prédateurs d’invertébrés. Sauf une? Malgré son nom, qui rappelle justement un grand animal carnivore, l’araignée sud-américaine
Bagheera kiplingi se distingue par son goût très prononcé pour la verdure. L’espèce observée au Mexique est presque totalement herbivore, expliquent des chercheurs dans la revue
Current Biology.
Cette découverte est d’autant plus étonnante que l’araignée en question se nourrit sur des acacias qui vivent en association avec des fourmis. C’est l’un des cas de mutualisme les plus étudiés en biologie : certaines espèces de fourmis habitent les acacias, trouvant refuge dans les épines enflées et partiellement creuses, et défendent la plante contre les herbivores. En échange, elles se nourrissent du nectar de la plante (riche en sucres) et de petites nodosités situées à la base des feuilles, les corps beltiens, riches en protéines et en lipides.
L’araignée
Bagheera kiplingi profite de cette situation pour se nourrir elle aussi des corps betliens, ont observé Christopher Meehan (Villanova University, E-U) et ses collègues. Les observations de terrain, conjuguées à des analyses isotopiques, montrent que les protéines de l’acacia constituent plus de 90% du régime alimentaire de l’araignée mexicaine. Des observations similaires ont été réalisées au Costa Rica.
C’est la première fois que l’on observe une araignée «chassant» une nourriture végétale, soulignent les chercheurs. Pour manger les corps beltiens,
Bagheera kiplingi doit tromper la surveillance des fourmis. Son agilité est l’atout principal de la végétarienne, qui appartient à la famille des araignées saltiques ou salticides, autrement dit sauteuses.
Jusqu’à présent, la consommation de pollens ou de nectar observée chez des araignées a toujours été secondaire voire anecdotique. La capacité de cette araignée à manger une nourriture végétale aussi ‘solide’ est totalement atypique, soulignent encore les chercheurs.